"Renforcer l'efficacité de la commande publique." Sous cet intitulé, le rapport signé Stéphane Saussier et Jean Tirole pour le Conseil d'analyse économique (CAE) présenté ce 15 avril 2015 formule dix recommandations. Faisant écho à la future transposition des directives européennes relatives aux marchés publics et aux concessions (voir nos articles ci-contre), les auteurs proposent plusieurs mesures pour accroître la transparence et contrebalancer la nouvelle flexibilité donnée aux pouvoirs adjudicateurs par un encadrement renforcé.
Une négociation mieux encadrée
Le rapport salue l'ouverture par les directives du recours à la procédure négociée en lieu et place de l'appel d'offres, aujourd'hui procédure de droit commun. De même, la possibilité de renégocier jusqu'à 50% du marché est accueillie positivement. Cette flexibilité donnée aux pouvoirs adjudicateurs peut cependant conduire à des dérives si elle n'est pas encadrée correctement. Les comportements opportunistes peuvent, selon le rapport, être contrecarrés en interdisant que la renégociation ne se limite qu'au prix et en s'assurant que la négociation sur les spécifications techniques ne conduise pas au détournement des idées de certains candidats. Il est pour ce faire préconisé de réaliser deux rapports, avant et après la négociation. Prévu par la loi Sapin, cette obligation est déjà applicable en matière de délégation de service public.
De plus, le rapport envisage la création d'une agence qui conseillerait les acheteurs publics dans le cadre de la passation de "gros contrats" c'est-à-dire au-dessus d'un seuil à fixer en fonction des moyens de l'agence. Celle-ci interviendrait donc en amont mais aussi en aval afin de suivre les renégociations des contrats. La mission d'appui aux partenariats public-privé (Mapp) a notamment été évoquée comme l'une des agences qui pourrait remplir ces missions.
Transparence accrue des informations et création d'un nouveau référé
Pour les auteurs, la transparence à 100% n'est pas souhaitable mais le citoyen doit être plus et mieux impliqué dans les procédures de la commande publique. Ils proposent ainsi de créer un référé-avenant qui serait le pendant juridictionnel de l'obligation de publication des avenants (en cas de modification de plus de 10% de la valeur du contrat). Ce recours, prenant exemple sur les référés précontractuel et contractuel, serait ouvert aux candidats évincés mais aussi à tout citoyen concerné. Le rapport envisage de plus la publication du rapport d'analyse des offres. Elaboré pour la commission d'appel d'offres, il devrait ensuite être épuré des informations sensibles et faire l'objet d'une publication automatique. Cette mesure suscite des inquiétudes auprès des acheteurs, l'un d'eux faisant remarquer ce 15 avril lors de la conférence de presse de présentation du rapport ne pas être "un membre de la Cada" (Commission d'accès aux documents administratifs). Cette transparence devrait aussi concerner les activités en gestion directe afin de pouvoir les comparer avec celles déléguées à des opérateurs privés.
Par ailleurs, la recommandation n°3 propose de centraliser les informations relatives à la réputation des entreprises. En effet, la directive sur les marchés publics prévoit de permettre aux pouvoirs adjudicateurs d'exclure une entreprise n'ayant pas respecté ses engagements contractuels dans le cadre de précédents marchés. Ces informations seraient réunies au sein d'une plate-forme en ligne. Le rapport préconise en effet de créer une plate-forme nationale, ou au moins de limiter le nombre de plates-formes régionales, afin de centraliser toutes les informations et d'en faciliter l'accès, notamment aux PME. Cette orientation est cruciale en raison de l'obligation de dématérialisation imposée par la directive. Cette dernière prévoit que 100% des procédures soient dématérialisées à l'horizon 2018. Aujourd'hui, 11% des marchés le sont et seulement partiellement.
Un recentrage des objectifs de la commande publique
Le rapport invite à une réflexion sur les objectifs de ces contrats. En effet, il ne serait pas opportun, ni même efficace, d'utiliser les marchés publics pour atteindre des buts sociaux ou environnementaux. Une approche globale devrait selon le rapport être préférée à l'inclusion de critères obligatoires dans les contrats de la commande publique. Ces critères, reconnus par la directive Marchés publics de 2014, sont facultatifs mais peuvent être rendus obligatoires par les Etats membres. Cette extension n'est pas prévue par l'ordonnance de transposition en France et le rapport s'oppose à toute "surtransposition" de la directive.
la note du CAE
source : lettre Localtis du 16 avril 2015
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"Mad Max en Père-la-Vertu, on aura tout vu !!!" (Tavi Lou Pastou, 10 avril 2013)
"Comme pertinemment indiqué par mon vieux pote Mad Max (le lapin rouge, le 25 octobre 2021, mais comme dirait Obélix, je ne suis pas vieux !)