Dans un arrêt du 22 février 2017, le Conseil d’Etat a eu à se prononcer sur la responsabilité d’un comptable public pour les paiements effectués dans le cadre de marchés publics. Cet arrêt est donc l’occasion de revenir sur les conditions de mise en œuvre ainsi que sur le régime de responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics.
En l’espèce, le procureur général près la Cour des comptes avait produit un réquisitoire à fin d’instruction de charges concernant six présomptions de charges à l’encontre de Madame Y., agent comptable du grand port maritime de Rouen (GPMR). Par un arrêt du 15 janvier 2016, la Cour des comptes l’a déclaré débitrice de près de 200.000 euros envers le GPMR. Cette somme correspondait à plusieurs paiements que Madame B avait versés à des sociétés dans le cadre de marchés publics. La Cour des comptes avait estimé que ces paiements étaient irréguliers, les prestations payées étant intervenues après l’échéance des marchés publics. Le Conseil d’Etat a toutefois censuré ce raisonnement.
Rappel du régime de responsabilité des comptables publics
Les juges de cassation ont tout d’abord rappelé le régime de mise en cause des comptables publics, prévu par l’article 60 de la loi de finances du 23 février 1963, dans sa rédaction issue de l’article 90 de la loi de finances rectificatives pour 2011 du 23 décembre 2011. En plus du régime de responsabilité de droit commun, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics peut être engagée dès lors notamment "qu’un déficit ou un manquement en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée, qu’une dépense a été irrégulièrement payée [...]". Cette responsabilité peut être mise en cause par le ministre dont relève le comptable, le ministre chargé du budget ou le juge des comptes. Une fois engagée, l’étendue de la responsabilité du comptable public dépendra de l’existence d’un préjudice financier causé à l’établissement public. Si le manquement de l’agent n’a pas causé de préjudice financier à la collectivité dont il dépend, il pourra être condamné par le juge des comptes à une somme dont le montant maximal est fixé par décret en Conseil d’Etat. Si le manquement du comptable a engendré un préjudice financier pour la personne publique, il devra alors obligatoirement et immédiatement verser de sa poche la somme correspondante.
Attention au paiement de marchés publics terminés
En l’espèce, Madame Y. avait procédé au paiement de nombreuses factures relatives à quatre marchés publics passés par le GPMR. Cependant, tous ces contrats étaient terminés lorsque Madame Y. a honoré les factures émises par les sociétés titulaires. La Cour des comptes a estimé que toutes les sommes payées par la comptable étaient irrégulières puisque les marchés étaient caducs. Pour sa défense, la comptable soutenait que des avenants de régularisation avaient été conclus, ou que des bons de commandes avaient continué d’être émis par le GPMR. La Cour des comptes n’a pas jugé cette argumentation suffisante, estimant que la responsabilité personnelle et pécuniaire de la comptable devait être engagée pour "défaut de contrôle de la validité de la créance et des pièces justificatives ayant entrainé un préjudice financier".
Toutefois, le Conseil d’Etat n’a pas confirmé la position de la Cour des comptes. Les sages du Palais Royal ont jugé que bien que certaines factures aient été payées sans fondement contractuel, le juge des comptes n’a pas "recherché si la volonté des parties de poursuivre la relation contractuelle pouvait être regardée comme établie". L’arrêt de la Cour des comptes a donc été annulé et l’affaire renvoyée devant cette même Cour.
Conseil d'Etat, n° 397924
source : lettre Localtis du 2 février 2017
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