- Le goût du blanc a écrit:
Bref, il va falloir sérieusement apprendre à gérer et suivre le SRH comme un véritable service de restauration, quasi-autonome (on pourrait peut-être s'inspirer de la gestion des CROUS et remplacer nos crédits nourritures par des tableaux de suivi de gestion...)
C'est pratiqué depuis plus de dix ans dans nombre d'établissements de l'Auvergne et ça fonctionne sans problème et on a enfin une vision réaliste du SRH. Alors oui certains SRH seront en difficulté c'est pourquoi il ne faut pas attendre Opale pour se pencher sur la question.
Pour ceux qui n'auraient pas lu mon article dans la revue de l'AJI :
II – Vers la gestion autonome du SRH.
Outre la résistance au changement des habitudes et les répercussions sur l’équilibre budgétaire, la principale explication qui est apportée pour justifier le maintien de cette pratique du reversement tient à l’absence de compteurs spécifiques pour les consommations propres au SRH ; ce qui rendrait impossible l’évaluation exacte du coût de la viabilisation qui représente la majeure partie des charges.
Mais avec l’arrivée d’Op@le, bon gré mal gré, il faudra bien abandonner ces reversements entre ALO et SRH et mandater directement dans le service les charges du SRH. Il est donc souhaitable que cette répartition des factures soit faite sur des bases cohérentes qui reflètent la réalité des coûts.
Depuis déjà des années nombre d’établissements ont trouvé la solution en utilisant des clés de répartition qui permettent de calculer les coûts imputables au fonctionnement du service de restauration et donc de répartir sur des bases réalistes le montant d’une facture entre ALO et SRH.
Pour les dépenses de viabilisation on utilise des clés de répartition en fonction des m² des divers locaux ou sur des bases de calcul individuelles.
Pour connaître par exemple le coût de l’eau relevant du fonctionnement du SRH on prend en compte la consommation estimée par utilisateur. On trouve sur internet les consommations moyennes d’eau par personne, par type de structure et par usage (2). Ainsi la consommation quotidienne moyenne est de 150 litres par personne dont 7% pour l’alimentation, 20 % pour les sanitaires, 39 % pour les bains… Dans le tableau annexe de cet article, un DP est compté pour une consommation journalière de 6,5 litres et un interne de 100 litres (boisson, cuisine, vaisselle, toilette, douches) ; ce qui donne à l’année 30% de la consommation totale du lycée. On rajoute la consommation calculée en fonction de la surface des locaux de la restauration et de l’internat par rapport à la surface totale de l’établissement (autres utilisations, sanitaires, nettoyage) soit 17 %. Ce qui donne une clé de répartition ALO/SRH de 53/47 en pourcentage qui sera appliquée sur chaque facture pour l’imputation directe à chaque service. Bien entendu c’est une clé à adapter à chaque établissement en fonction de son fonctionnement et de ses spécificités.
Pour les dépenses de chauffage le même calcul à partir des surfaces est appliqué avec une pondération pour tenir compte que l’internat est chauffé sur une plus longue période que le reste du lycée (voir exemple dans le tableau en annexe). Idem pour l’électricité dont le calcul pourra être pondéré le cas échéant en fonction de machines pédagogiques énergivores ou d’éclairage des salles de classes sur une durée plus longue lorsqu’il n’y aura pas d’internat pour compenser.
Pour le gaz (hors chauffage) on tient compte de l’usage qui, dans l’exemple, est majoritairement destiné à la cuisine.
Pour les autres dépenses nécessaires au fonctionnement du SRH, ce n’est pas plus compliqué. L’individualisation des dépenses d’entretien, de réparation ou de produits de nettoyage est en général facile à réaliser connaissant le service de destination et les produits qui lui sont destinés. Une facture de réparation sur des matériels dédiés à la restauration ou à l’hébergement sera directement mandatée au SRH ; idem pour des travaux ou contrats concernant spécifiquement les appareils ou locaux de ce service. Pour les fournitures, il y en a un certain nombre qui sont facilement identifiables pour être à destination du SRH (produit pour la plonge, vaisselle, literie, vêtements pour cuisiniers, etc…). Et lorsque l’identification du service destinataire ne sera pas évidente, on pourra utiliser là aussi des clés de répartition (exemple au m² pour les produits de nettoyage) ou procéder à une analyse pour déterminer un pourcentage de répartition (exemple nombre d’extincteurs dans les locaux du SRH pour la répartition du contrat de maintenance). Pour les charges générales, un gestionnaire a généralement une bonne connaissance du fonctionnement de son établissement et est en mesure de fixer des règles de répartition après analyse globale des dépenses. A titre d’exemple, les pourcentages de répartition suivants ont été utilisés par la plupart des lycées de l’ancienne région Auvergne lorsque ce système a été mis en place :
- Assurance, affranchissements et téléphonie : 5,00 % des factures concernées
- Contrats et contrôles obligatoires non individualisables : 5,00 % des factures concernées
- Déchets : 65,00 % des factures concernées (il est évident que le SRH est généralement le plus gros producteur de déchets de l’établissement).
- Autres services non individualisables : 5,00 % des factures concernée.
Bien entendu chaque établissement étant différent il est souhaitable que ces clés de répartition soient fixées EPLE par EPLE, et qu’elles le soient dans le simple but de refléter la réalité des charges du SRH et non pour équilibrer le budget global de l’établissement.
Afin que le comptable puisse exercer les contrôles qui lui incombent, notamment celui de la correcte imputation budgétaire, il est nécessaire d’avoir un acte qui retrace ces différentes clés de répartition. Puisque le SRH est de la compétence des départements et régions, cet acte peut émaner de la CT après proposition du CA ou être voté par le CA si la collectivité lui laisse cette possibilité. Quoiqu’il en soit un tel acte sera indispensable comme l’était celui qui définissait auparavant les modalités du reversement entre services et devra être joint au premier mandat concerné par une répartition.
III – les perspectives de gestion budgétaire.
Même si la mise en service du nouveau logiciel Op@le est prévue pour la majorité des établissement en 2023, il convient de ne pas attendre pour se pencher sur le futur budget autonome de votre SRH afin d’anticiper les problèmes que ce changement induira automatiquement en matière de gestion budgétaire.
Pour ceux qui sont encore en matière de préparation budgétaire avec un reversement calculé avec un pourcentage sur les sommes payées par les utilisateurs du service (familles et commensaux), il y a toutes les chances que ce montant de reversement soit très différent, à la hausse comme à la baisse, de celui qui sera obtenu en additionnant les charges « réelles » à retranscrire au SRH.
Il est donc nécessaire de procéder sans attendre à une analyse réaliste des charges imputables à votre service de restauration et d’hébergement afin d’en mesurer l’impact budgétaire. En effet, en fonction des charges réelles de votre SRH vous pouvez vous trouver en grande difficulté pour équilibrer le service compte tenu de recettes nettement insuffisantes ; à l’inverse vous pouvez constater également que votre SRH est structurellement excédentaire.
Il faudra également analyser l’impact que ce nouveau mode de calcul aura sur votre service ALO. Si le reversement était supérieur aux charges réelles du SRH comptabilisées en ALO, ce sera une perte de recettes pour le fonctionnement général de l’établissement, et dans le cas contraire on aura une marge de manœuvre financière plus grande pour le fonctionnement général.
Exemples de répercutions budgétaire du changement de mode de calcul des charges du SRH :
Reversement forfaitaire actuel SRH / ALO : 20 000 €.
Estimation des charges « réelles » du SRH comptabilisées dans ALO : 12 000 € (prise en compte de toutes les factures relevant du SRH avec application des clés de répartition définies).
-Perte de recettes au futur budget pour le fonctionnement général : 8 000 € (qu’il faudra compenser par d’autres recettes, des économies, une augmentation de la DGF ou du FdR).
-Gain pour le SRH : 8 000 €.
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Reversement forfaitaire actuel SRH / ALO : 20 000 €.
Estimation des charges « réelles » du SRH comptabilisées dans ALO : 25 000 € (prise en compte de toutes les factures relevant du SRH avec application des clés de répartition définies).
-Gain au futur budget pour le fonctionnement général : 5 000 € (possibilité d’augmenter les dépenses en AP et ALO à recettes constantes).
-Diminution de « recettes » pour le SRH : 5 000 € (risque pour le SRH de ne pas pouvoir être en équilibre en fin d’exercice sans subvention complémentaire ou recours au FdR).
Comme on le voit sur ce tableau, le nouveau mode de calcul imposé par Op@le va avoir des répercussions importantes sur l’équilibre global du futur budget pour tous ceux qui pratiquent encore le reversement SRH/ALO. Mais il va aussi avoir un effet bénéfique en mettant fin à toutes les manipulations qui consistaient à jouer sur le calcul de ce reversement pour faire un budget qui soit le plus présentable possible au mépris de sa sincérité.
Si les modalités de répartition des factures ne donnent pas lieu à de nouveaux errements on pourra enfin respecter le principe qui veut que le SRH couvre par ses ressources, la totalité des charges qu’implique son fonctionnement ; et on pourra enfin parler d’un vrai service annexe de restauration et d’hébergement.
L’enjeu est important aussi bien pour l’établissement que pour les collectivités. Ce nouveau mode de calcul permettra de connaître la situation financière exacte des SRH des établissements scolaires ; de connaître le coût réel de fonctionnement et de le mettre en parallèle avec le tarif des repas défini par la collectivité.
IV – La notion « d’équilibre structurel ».
Il apparaîtra que certains SRH ne pourront être à l’équilibre sans une aide de la collectivité qui en a la responsabilité ; et que d’autres dégageront des marges de manœuvre financières qui leur permettront une restauration de qualité supérieure et de l’investissement.
En effet, chaque SRH a ce qu’on peut appeler « son point d’équilibre structurel » en-deçà duquel la gestion devient problématique et l’équilibre financier plus qu’incertain.
Si le montant des dépenses de denrées alimentaires varie forcément avec le nombre de rationnaires, il est d’autres charges sur lesquelles le nombre de DP ou d’internes n’a pas ou très peu d’incidence. Ainsi le chauffage des locaux du restaurant et de l’internat sera identique quel que soit le nombre d’élèves accueillis au SRH, idem pour d’autres dépenses peu sensibles aux fluctuations des effectifs : électricité, nettoyage, vérifications, maintenance, etc…. Ces charges représentent, hors nourriture, la majeure partie des dépenses du SRH, et pour les financer il faut un nombre minimum de rationnaires.
Une étude de différents comptes financiers montre que la part du 6011 par rapport aux recettes du 7062 fluctue entre 46 et 54 % et que la moyenne est de 49 % ; ce qui fait qu’il reste 51 % pour financer les autres charges.
Prenons l’exemple d’un établissement dont les charges « incompressibles », fixes ou structurelles (viabilisation, contrats obligatoires, etc…) seraient de l’ordre de 50 000 € (montant calculé sur la moyenne des dépenses des trois derniers exercices avec application des clés de répartition), et qui aurait un tarif de demi-pension annuel de 500 €. Si on se base sur un pourcentage de 50% des recettes du 7062 utilisées pour l’achat de denrées, il faut 200 demi-pensionnaires pour équilibrer le budget du SRH sur les charges structurelles. En dessous de ce chiffre de 200, pour équilibrer le SRH il faudra faire des économies notamment aux niveaux des denrées, et avec 100 DP il sera impossible d’arriver à l’équilibre sans subvention de la collectivité ou une hausse importante des tarifs. Par contre, au-delà de ce chiffre de 200 DP, comme les charges structurelles seront couvertes, l’argent qui ne sera pas utilisé à cette fin pourra favoriser une amélioration sensible de la qualité des denrées, des achats d’équipements et des améliorations du service.
On voit donc que si on retranscrit de la manière la plus sincère possible la totalité des charges relevant de la restauration et de l’internat au SRH, le nombre de demi-pensionnaires et d’internes est une composante majeure pour équilibrer ce service. En-deca d’un certain effectif l’équilibre sera inatteignable sans une hausse importante des tarifs ou sans une subvention spécifique de la CT. Cette étude devrait conduire à une analyse complète des charges de fonctionnement et, le cas échéant, à saisir la collectivité en cas de « déficit structurel » sur les solutions qu’elle entend apporter pour assurer l’équilibre du SRH avec la nouvelle perspective budgétaire apportée par Op@le. De même les établissements qui utilisent encore des pourcentages de reversement dictés par leurs collectivités sans lien avec la réalité des dépenses ont tout à gagner à les alerter sur la modification budgétaire à venir afin que des groupes de travail se réunissent pour en anticiper les conséquences, et fournir aux EPLE des consignes claires en matière de clés de répartition.
La disparition des reversements entre services est une remise en cause importante des habitudes qui va causer des difficultés à nombre d’établissements. Mais plus qu’une contrainte supplémentaire il faut y voir une opportunité de mettre les choses à plat et de repartir sur une base saine afin de connaître le vrai coût de la restauration. L’occasion aussi de mettre les collectivités face à leurs responsabilités et leur demander d’assumer financièrement leur choix en matière de tarifs et d’exigence qualitative pour un service relevant de leur compétence propre.