Extrait d'un de mes articles :
La production d’un contrat.
Si, au-delà de 25 000 € HT il faut un document, en deçà de ce montant il faut également joindre le contrat ou la convention lorsque la facture concernée en fait mention et s’y réfère, puisque dans ce cas la facture atteste de l’existence d’un écrit.
Dès lors la rubrique « 4123 - Dépense justifiée par un marché public à procédure adaptée faisant l'objet d'un écrit » du décret n°2016-33 du 20 janvier 2016 indique clairement que les pièces à produire sont :
« 1. Contrat et, le cas échéant, avenant.
2. Mémoire ou facture ».
Et un ajout indique que « tout contrat mentionné dans une pièce justificative (facture, ...) doit être produit à l'appui du mandat. Lorsqu'un contrat doit être produit, il ne l'est qu'à l'appui du premier paiement ».
Il appartient donc au comptable d’exiger ce contrat et de procéder à sa cohérence avec les éléments facturés : contrôle de la qualité du signataire, de la date de validité, de la revalorisation éventuelle, etc…
Il arrive cependant qu’une facture fasse mention d’un contrat alors qu’il n’existe à la base qu’un simple engagement, voire qu’un échange de courriels ; dans ce cas le comptable prendra la précaution de demander copie du bon de commande ou attestation de l’ordonnateur sur l’absence de contrat formalisé.
La production d’un contrat « au sens large ».
Lorsqu’un contrat « classique » est mentionné sur une facture il doit donc être obligatoirement joint ; mais qu’en est-il lorsque la facture fait référence à un devis ou même à un simple bon de commande ?
On peut déjà préciser qu’un devis accepté par l’ordonnateur, et clair quant à la nature et l’objet de la dépense, est un contrat (CC « TPG du Gard », 28 juin 2013). De même, un bon de commande qui mentionne l'identification des parties contractantes, la définition de l'objet du marché, le prix ou les modalités de sa détermination, les conditions de règlement et qui est accepté par le fournisseur a valeur de contrat. On se retrouve donc dans le cas de la rubrique 4123 du décret de 2016 indiquée ci-dessus. Cette rubrique mentionne d’ailleurs une précision : « au sens du présent texte, la notion de contrat peut s'entendre comme convention signée des parties, devis précisant les conditions financières ou tout autre document écrit constitutif d'un accord de volonté des parties ».
Comme pour les arrêts « Symoresco » l’évolution de la jurisprudence en la matière démontre s’il en était besoin l’incertitude juridique qui accompagne au quotidien le comptable dans ses contrôles. Des CRC en 2014 et 2015 avaient considéré que la référence explicite à un marché sur une PJ d’un mandat inférieur au seuil de l’écrit ne suffisait pas à préjuger de l’existence d’un contrat écrit que le comptable devait fournir. Mais depuis la jurisprudence a évolué, ce qui a conduit en 2019 à la diffusion de l'information suivante :
« Suite à des observations émises par les auditeurs des Finances Publiques lors d'audits dans les EPLE, la DAF A3 du Ministère de l’Éducation Nationale rappelle le point suivant :
"On rappellera que le bon de commande est requis en tant que pièces justificatives du mandat :
- pour les accords cadre qui donnent lieu à l'émission de bon de commande - § 41312.Autres pièces générales du décret 2016-33 du 20 janvier 2016 fixant la liste des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé
- pour les autres marchés lorsque le montant est égal ou supérieur à 25 000 euros H.T ou lorsque la référence au bon de commande est indiquée sur la facture - § 4 du décret précité - remarque 3 "Toute pièce référencée dans un document produit au comptable (facture, contrat, CCAG, CCAP...), nécessaire à ses contrôles, doit lui être produite ».
Concernant les accords cadre, la rubrique 41312 citée ci-dessus précise trois cas pour les marchés à bons de commande où le bon de commande doit être joint :
« - le cas échéant, le bon de commande complétant les dispositions financières du marché relatives aux délais d'exécution ;
- le cas échéant le bon de commande complétant les dispositions financières du marché relatives aux primes, aux pénalités, uniquement dans le cas où des primes ou des pénalités sont décomptées ;
- lorsque la date d'exécution des prestations est postérieure à la date de fin du marché, le(s) bon(s) de commande correspondant(s) ».
Outre ces cas, en application des autres rubriques du décret de 2016 on peut déduire également que ce bon de commande doit être joint lorsque l’accord cadre donne lieu à des marchés subséquents (7) pour des prestations et des modalités, notamment financières, non définies précisément dans les documents de l’accord cadre (exemple : accord cadre pour transport en commun dans le cadre de sorties, accord cadre multi attributaire, etc…).
On notera également que l’article R 2162-13 du Code de la commande publique précise que « les bons de commande sont des documents écrits adressés aux titulaires de l’accord-cadre qui précisent celles des prestations, décrites dans l’accord-cadre, dont l’exécution est demandée et en déterminent la quantité ».
Concernant le cas où la référence au bon de commande est indiquée sur la facture, cette mention, qui indique que toute pièce mentionnée notamment sur une facture doit être communiquée au comptable, figure en préambule de la rubrique 4 du décret décrivant les pièces justificatives pour les dépenses de la commande publique. Elle présente donc un caractère général et s’applique à tous les marchés, quel que soit leur montant.
La jurisprudence de la Cour de comptes vient confirmer cette position des auditeurs des Finances. Ainsi dans l’arrêt « Receveur régional des douanes d’Ile de France » du 23 novembre 2018 (5) la Cour a jugé que «… si le montant de la prestation facturée était inférieur au seuil prévu… du code des marchés, il n’était pas juridiquement nécessaire qu’un contrat écrit soit établit et produit à l’appui du paiement, dès lors qu’il résultait des mentions inscrites sur la facture que la prestation facturée avait été exécuté en application d’un devis et d’un bon de commande, ces pièces auraient dû être produites à l’appui du paiement dans la mesure où elles avaient, par leur réunion, la valeur juridique d’un contrat ; qu’en procédant au paiement sans disposer des pièces valant contrat, le comptable a manqué à ses obligations en matière de contrôle de la validité de la créance… ». On peut aussi noter que la Cour précise que le regroupement des débets et des sommes non rémissibles est une simple faculté ouverte au juge ; et dans un arrêt elle considère qu’il ne s’agissait pas d’un manquement unique parce que des marchés distincts étaient en cause.
On peut donc en déduire que lorsqu’une facture fait référence non seulement à un contrat mais aussi à un devis ou à un bon de commande ils doivent accompagner la facture présentée dans le mandatement (on note qu’en l’état actuel de la jurisprudence, les bons de livraison mentionnés sur une facture ne sont pas des pièces justificatives demandées par le juge des comptes).