Par une décision du 30 mars 2016, le Conseil d'Etat a dû se prononcer sur la communicabilité des documents constitutifs d'un marché public.
En l'espèce, le centre hospitalier (CH) de Perpignan avait lancé une procédure en vue de la passation d'un marché public d'assurance en responsabilité civile. Le contrat ayant été attribué à la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), le bureau européen d'assurance hospitalière (BEAH), candidat évincé, a demandé à l'établissement hospitalier la communication des pièces et annexes de ce marché.
Comme le veut la procédure, le candidat évincé a d'abord saisi la commission d'accès aux documents administratifs (Cada). Cette dernière a rendu un avis favorable à la communication des documents demandés mais le directeur du CH a confirmé son refus. Le BEAH a alors saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande d'annulation de la décision de refus de communication. Le juge y a partiellement fait droit et a annulé la décision litigieuse en tant qu'elle refuse de communiquer au candidat évincé le formulaire de réponse financière de la SHAM. Le CH de Perpignan a alors saisi le Conseil d'Etat d'un pourvoi en cassation.
Les juges du Palais-Royal ont tout d'abord commencé par rappeler le principe selon lequel les documents des marchés publics, y compris ceux relatifs au contenu de l'offre, sont des documents administratifs communicables au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978. Ce principe est toutefois tempéré par l'article 6 de cette même loi en vertu duquel la protection de la vie privée, le secret médical et le secret en matière commerciale et industrielle peuvent faire obstacle à la communicabilité de certains documents.
En l'occurrence, le premier juge avait estimé, à l'instar de la Cada, que le directeur du CH de Perpignan ne pouvait refuser de transmettre le bordereau unitaire des prix de la SHAM au candidat évincé. Selon lui, la communication de ce document ne pouvait porter atteinte à la concurrence, le marché n'étant pas susceptible d'être renouvelé à brève échéance. Le Conseil d'Etat a cependant adopté une position contraire, estimant que si "l'acte d'engagement, le prix global de l'offre et les prestations proposées par l'entreprise attributaire sont en principe communicables, le bordereau unitaire des prix de l'entreprise attributaire, en ce qu'il reflète la stratégie commerciale de l'entreprise opérant dans un secteur d'activité et qu'il est susceptible, ainsi, de porter atteinte au secret commercial, n'est quant à lui, en principe, pas communicable".
Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est donc entaché d'une erreur de droit, le refus de communication par le directeur du CH du prix détaillé de l'offre de la SHAM au BEAH étant justifié. Le Conseil d'Etat a en conséquence annulé l'arrêt en ce sens.
Cette décision intervient alors que la directive européenne "secret des affaires", visant à mieux protéger les entreprises face à l'espionnage économique et industriel, sera débattue en séance plénière à Strasbourg ce 13 avril.
CE, 30 mars 2016, n°375529
source : lettre Localtis du 14 avril 2016
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