Dans un arrêt rendu le 28 décembre 2001, le Conseil d'Etat a accepté un e-mail comme preuve lors d'un litige : les juges ont considéré qu'il
était possible d'identifier l'auteur de l'e-mail grâce aux autres documents papiers qu'il avait adressé à ses interlocuteurs. Cette
décision vient renforcer la jurisprudence récente sur les échanges électroniques : en juin 2001, le TGI de Paris avait aussi reconnu la
valeur juridique d'un e-mail. Il s'agissait cette fois-ci d'un courrier "recommandé", envoyé sur un site qui propose ce service.
Les deux décisions concernent les e-mails dits "classiques", donc sans signature électronique. Tous nos échanges auront-ils alors un poids juridique, comme s'il s'agissait des lettres écrites et signées ? La valeur juridique d'un e-mail dépend en fait de l'identité des interlocuteurs.
Un courrier échangé entre deux commerçants, un consommateur et un professionnel ou un salarié et l'employeur n'a pas le même effet. Selon la législation, la preuve est libre devant les prud'hommes ou dans les litiges qui opposent les professionnels. Ainsi, une entreprise a toute
la liberté d'utiliser un e-mail ou un fax comme preuve lors d'un procèscontre une autre société.
Le principe est différent lorsqu'il s'agit des relations entre particuliers et commerçants ou entreprises et administration. La législation part du principe que les réseaux télécoms ne sont pas fiables et qu'on peut facilement manipuler le contenu du message.
L'e-mail n'a donc pas encore le poids d'une lettre écrite dans ces cas.
Mais même s'il ne constitue pas de "preuve irréfutable", les juges peuvent le considérer comme un "commencement de preuve". A condition de respecter les trois principes de "fiabilité" : identification claire de l'émetteur, précision de la date et assurance de l'intégralité du message. Pas question donc de prétendre à un droit parce qu'on a mis un nom quelconque en bas du message ou qu'on a envoyé un mail avec l'adresse pdgdelasociete@yahoo.com
Pour les messages importants ou susceptibles de faire l'objet d'un litige, il est conseillé d'utiliser une signature électronique. Cette technologie garantit l'identité de l'émetteur et le contenu du message.
L'e-mail ainsi envoyé a une valeur juridique. Autre solution : utiliser les services de "courrier recommandé" des sites spécialisés, comme lettrerecommandee.com ou Emailrecommande.
L'expéditeur reçoit un certificat d'émission et le destinataire un certificat de délivrance. Depuis la décision du Tribunal de Grande Instance de Paris, ces services sont reconnus par les tribunaux. Pour une double sécurité, il est également possible d'ajouter une signature électronique aux messages recommandés.
Mais attention, beaucoup de flou persistent sur la signature électronique, en attendant la publication de l'arrêté ministériel sur le sujet. L'arrêté doit définir les organismes habilités à délivrer les certificats. Or, beaucoup d'internautes utilisent aujourd'hui la signature électronique et risquent de se trouver demain avec des prestataires qui n'ont pas les autorisations nécessaires. L'arrêté risque également de rendre "nulles" les signatures par PGP (Pretty Good Privacy, outil de cryptage gratuit), car elles ne seront pas délivrées par un organisme reconnu. En attendant la nouvelle législation, quelques précautions peuvent éviter les soucis. Il est conseillé de faire apparaître explicitement le nom de l'interlocuteur dans l'adresse e-mail (ex : prénom.nom@societe.com, au lieu de contact@societe.com). Dans une relation commerciale, les différentes parties peuvent aussi se mettre d'accord sur la définition des pièces qui font preuve en cas de litige.
Et faire attention à ce qu'elles disent dans leurs conversations électroniques : car l'e-mail a toutes les forces de l'écrit sans en avoir l'air.
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Il ne faut jamais juger les gens sur leurs fréquentations : Judas par exemple avait des amis irréprochables
Cherche et tu trouveras Luc, Chap. 11: «…Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve ».
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