L’établissement scolaire fait-il société ?
JY LANGANAY – Education & Devenir
Examen des jeux de rôles au sein du conseil d’administration
"En 2002, j’ai co-écrit avec Claude REBAUD, « L’établissement scolaire, un jeu collectif ». Nous n’étions pas loin de la question posée aujourd’hui.
J’ai fait le choix d’un focus sur un espace où l’idée de « faire société » devrait normalement s’exprimer. On verra qu’il y a encore beaucoup à faire mais que des pistes de progrès sont possibles, à condition de le vouloir.
Un examen critique du fonctionnement des conseils d’administration gagnerait à être engagé après près de vingt cinq ans. Trop souvent, leurs débats se limitent à des échanges convenus entre deux catégories d’acteurs (direction et enseignants) s’opposant d’une manière artificielle et qu’il est opportun de dépasser.
Je me propose donc d’esquisser ici l’observation du rôle qu’y tient chaque catégorie d’acteurs et de voir quelques pistes de progrès possibles. L’essentiel de cette intervention a fait l’objet d’une publication dans la revue « diversité –ville/école/intégration » n° 150 de septembre 2007.
Les personnels de direction et d’éducation
Le législateur a assigné aux chefs d’établissement plusieurs missions : représentant de l’Etat nommé par celui-ci, responsable de l’exécutif de l’EPLE et donc garant de son autonomie juridique, responsable de la bonne conduite des activités pédagogiques et éducatives. Ces trois missions, en principe complémentaires, peuvent entrer en tension, par exemple la tension entre autonomie locale et appartenance à un système hiérarchique.
Cette tension est aujourd’hui compliquée par le sentiment d’irruption d’une hiérarchie supplémentaire, les collectivités territoriales.
Ces missions multiples, voire contradictoires sont réunies dans la présidence du CA conférée de droit au principal ou au proviseur avec la redoutable tâche de concilier son lien hiérarchique avec le recteur et l’inspecteur d’académie et la défense de l’identité et des intérêts propres de l’établissement qu’il dirige.
De ce fait la « présidence » des CA est nécessairement orientée par les objectifs que poursuit le chef d’établissement. Son attention aux intérêts défendus par les autres membres du CA ne peut manquer de s’en trouver altérée.
Bien entendu, cette posture se justifie totalement par la définition d’une autonomie cadrée par la place de l’établissement dans un système éducatif où l’Etat entend continuer de jouer tout son rôle.
Mais la variété des styles de direction fait que les risques d’exercice solitaire du pouvoir ou de manipulation de l’assemblée par la maîtrise de l’information ne peuvent être totalement exclus. Euphémisme !
Pour l’instant, les tentatives de modification de ce système où le chef – président est juge et partie, se heurtent à l’opposition des représentants syndicaux des personnels de direction. L’exemple des établissements publics agricoles ou d’autres structures de l’Education nationale ne font pas recette. Pour combien de temps ? J’ai dirigé un CRDP dont les CA étaient présidés par le recteur. Les ordres du jour et la préparation des séances faisaient l’objet d’une solide préparation et ma position de directeur était confortée par le président du CA !
Si la posture des gestionnaires, agents comptables, chefs de travaux et directeurs adjoints chargés de SEGPA est facilement identifiable de par leurs missions spécifiques, d’autres situations méritent encore examen :
- celle des adjoints dont le statut est peu défini réglementairement et les fonctions très conditionnées à la réalité de l’établissement et à la relation avec le chef
- celle du CPE, membre de droit, fréquemment tiraillé entre les impératifs de loyauté liés à sa désignation et son souhait de compter parmi les représentants des personnels.
Pour l’observateur avisé, le CA est un bon observatoire de la solidarité réelle de l’équipe de direction et des relations de loyauté en son sein."
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